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Exposition : « La géographie, ça sert, d’abord, à faire la guerre »

Exposition : « La géographie, ça sert, d’abord, à faire la guerre »

Au croisement d’une réflexion sur les politiques de la représentation et les imaginaires géographiques, l’exposition "La géographie, ça sert, d’abord, à faire la guerre" s’intéresse aux visualités des guerres contemporaines, à ces fictions esthétiques disciplinant l’espace.

du 17 octobre 2014 au 24 octobre 2014

La géographie, ça sert, d’abord, à faire la guerre

Daniel Eisenberg / Louis Henderson / Sean Snyder / Armin Linke, Francesco Mattuzzi & Decolonizing Architecture / Pierre-Yves Vandeweerd / Wael Nourredine / Cyprien Gaillard

Commissariat : Aliocha Imhoff & Kantuta Quirós (le peuple qui manque)

Exposition du 17 au 24 octobre 2014, Bogota, Colombie
Vernissage le 17 octobre, 18h

Sous forme d’exposition, le programme La géographie, ça sert, d’abord, à faire la guerre présenté à Paris en 2011 à l’invitation du BAL, voyage et se sera présenté à Bogota dans le cadre de la Muestra Internacional Documental de Bogota.

Au croisement d’une réflexion sur les politiques de la représentation et les imaginaires géographiques, l’exposition La géographie, ça sert, d’abord, à faire la guerre (1) s’intéresse aux visualités des guerres contemporaines, à ces fictions esthétiques disciplinant l’espace.
Historiquement, loin de n’être que des réductions littérales du monde en images, des relevés inertes et objectifs, on sait que les cartes ont été mises au service des appropriations territoriales et militaires, de l’histoire du colonialisme et des récits nationaux.
Après le 11 septembre 2001, le géographe canadien Derek Gregory identifiait un « tournant culturel dans l’économie visuelle de l’imaginaire militaire américain », entre culture de la simulation et recours accru de l’état-major aux sciences sociales (anthropologie, ethnographie, linguistique)(2) . Supposé accroitre et affiner la connaissance du terrain et diminuer la létalité des conflits déclarés au Moyen-Orient et en Asie Centrale, ce tournant culturel arborait une coloration qui se présentait comme « humaniste ». Pourtant, avec ce qu’il qualifiait, à la suite du théoricien postcolonial Edward Saïd, de géographies imaginatives, Gregory identifiait plutôt autant de stratégies qui produisent de la différence culturelle et la transforment en distance irréductible, rendant acceptable et légitime la conduite des conflits. L’espace apparaît ainsi non pas seulement comme une donnée figée, mais comme une construction idéologique dynamique et une fabrique d’altérité ; la géographie révèle alors son usage politico-militaire et, davantage encore, technoculturel. Une mise à distance qui se fait héritière d’une rupture initiée lors de la première guerre du Golfe, où les visualités de la guerre ont connu une inflation spectaculaire, virtuelle et « télesthésique », comme le faisait remarquer en 1994 le théoricien des médias McKenzie Wark (3). La couverture médiatique des guerres est devenue, pour les armées, un paramètre stratégique de première importance, tandis que les conduites réelles des opérations sont invisibilisées, notamment par l’émergence du phénomène des journalistes couvrant les guerres, à distance, depuis leur hôtel, diffusant les images fournies par les armées.
D’autre part, de nouvelles modélisations du conflit déploient une pensée de l’espace qui trouve dans la stéréoscopie, la cartographie 3D (Armin Linke et Francesco Mattuzzi), la modélisation informatique, l’imagerie téléaérienne, la simulation, leur modèle théorique. Autant de dispositifs militaires, qui sont de manière co-extensive de nature scopique, tel que le montre l’architecte israélien Eyal Weizman et le collectif Decolonizing architecture qui analysent les architectures militaires israéliennes dans les colonies comme des dispositifs d’urbanisme optique.

Kantuta Quirós & Aliocha Imhoff

1 – Nous empruntons ce titre à l’opus polémique éponyme du géographe et géopoliticien Yves Lacoste, paru en 1976, aux éditions Maspero et réédité en 2008 aux éditions La Découverte. Cette exposition a été présentée dans une version déployée, pour la première fois en 2011 à Paris, à l’invitation du BAL, centre d’art consacrée à l’image-document,
2 – Lire de Derek Gregory, The colonial present: Afghanistan, Palestine, Iraq (2004, Blackwell Publishers) ; Violent geographies: fear, terror and political violence (2007, New York: Routledge)
3 – McKenzie Wark, Virtual geography : Living with global media events ; Bloomington ; Indiana University Press, 1994

Remerciements :  les artistes et galeries, MID Bo et Centro Cultural de la Memoria, Pablo Mora, José Alejandro Restrepo, Natalia Gualy, Institut Français (Vincent Gonzalvez), Ambassade de France en Colombie (Jean-Marc Laforêt (Ambassadeur), Antoine Sebire (Attaché Audiovisuel pour les Pays Andins), Gilma Rubio), Jean-Yves Jouannais, Laura Huertas Millan, Mildred Duran, Miguel Huertas Millan, Guillermo Vargas Quisoboni, Andres Melendes, le Bal (Diane Dufour, Fannie Escoulen, Aurélie Wacquant).


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