Thierry Decordier peint une mer ombrageuse et ténébreuse, d’une force indomptable et insurmontable par l’homme. La Manche déchainée tue les couleurs et une hiérarchie s’impose : seule la montagne rivalise avec la mer. L’humilité de l’homme face à la nature est également dans l’œuvre de Lin Xue. Il dessine volontairement avec du bambou qui, ne retenant pas l’encre, oblige à dessiner très rapidement. Des formes organiques émergent, transmettant en temps réel, la vitalité de la nature.
Christopher Williams quant à lui, explore le lien entre le colonialisme et la botanique, avec son œuvre Angola to Vietnam. La nature sauvage, avec ses animaux et ses nuages, telle qu’elle fut saisie encore intacte, est présentée par deux photographes, décédés il y a vingt et quatre-vingt ans, Eliot Porter et Edouard Spelterini. Enfin, le film Grosse Fatigue de l’artiste française Camille Henrot assemble différents récits de l’univers, en particulier des récits amérindiens, sensibilisant au devenir du vivant.
Les rendez-vous manqués
Parmi les rendez-vous manqués ou décevants, citons les pavillons de Nouvelle-Zélande, Espagne, France et Canada. Le Pavillon de Nouvelle Zélande expose Front Door out back de Bill Culbert qui passé l’amusement fugitif d’un néon traversant des bidons de lait, fait pâle figure si l’on vient de sortir de l’exposition Pedro Cabrita Reis au Palais Falier (événement collatéral) qui y montre magistralement ce que néon peut dire. Le pavillon espagnol ne soutient pas non plus la comparaison avec le pavillon grec, autre pays dans la déconfiture économique. Lara Almarcegui, pourtant une artiste généralement passionnante, se noie dans un gaspillage de gravas qui donne une impression qu’un « déjà vu ». Le pavillon français confié à Anri Sala est posé et pesant, avec une installation imaginée à partir d’une simple fantaisie d’un compositeur. Là encore, on ne peut s’empêcher de comparer, si Maurice Ravel était ressuscité comme William Morris, le pavillon français aurait été bien plus inspirant. Le pavillon du Canada quant à lui, a donné une carte blanche à Shary Boyle qui semble se perdre dans une démonstration de l’hystérie.
La Biennale de Venise 2013 a fait le pari d’un large périmètre d’exploration et d’une démarche de conscience au-delà des miroirs. Ce n’est donc pas un hasard si les thématiques liées au développement durable y ont une place de choix. Cette Biennale est un moment fort et empathique, à voir avant sa fermeture, à la fin du mois de novembre.